[Dossier] L’immobilier : Un poids permanent sur les plus vulnérables
Immobilier, couloir de blanchiment d’argent

Au Togo, l’immobilier constitue l’autre grand poids qui pèse sur la population, surtout la plus vulnérable. Bon nombre de la population a recours à l’immobilier qui est composé d’ensemble des biens de types bâtiments, terrains, constructions, ainsi que les droits qui leurs sont attachés. C’est un secteur qui touche décidément tout le monde. Fonctionnaires, artisans, étudiants, apprentis, jeunes ou adultes, tous sont concernés d’une manière ou d’une autre, dès lors qu’il s’agit de quitter un lieu X pour résider à un lieu Y. Les nantis et moins nantis ne sont pas épargnés sauf que cela pèse plus sur les plus pauvres. Pendant que ces derniers grincent les dents, les acteurs directs qui sont les agents immobiliers et les démarcheurs parviennent, eux, à tirer leur épingle du jeu.
L’immobilier contribue à façonner l’environnement et l’aménagement urbain, le développement des infrastructures et la qualité de vie des habitants. L’immobilier est accessible à tous que vous soyez une entreprise, un particulier ou encore une institution. L’acquisition d’un bien immobilier peut être effectuée pour diverses raisons, notamment pour l’utilisation personnelle, l’investissement, l’exploitation commerciale ou le développement. On parle alors de patrimoine immobilier pour désigner un ensemble de biens immobiliers détenus par un tiers.
L’immobilier s’inscrit dans un marché économique important qui englobe l’achat, la location, la vente, la gestion et le développement des biens. Il faut dire que l’immobilier a eu un essor fulgurant ces dernières décennies grâce au développement des villes et pays. Et cela fait émerger de nouveaux métiers, comme les démarcheurs, les courtiers, agents immobiliers, notaires, avocats et bien sûr les établissements bancaires et d’investissements.
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Le secteur de l’immobilier est aujourd’hui, l’un des secteurs les plus porteurs tant pour ceux qui en font un métier que pour ceux y investissent en tant que propriétaires. Il implique de nombreuses professions spécialisées comme les courtiers, agents immobiliers, notaires, avocats et bien sûr les établissements bancaires et d’investissements.
Au Togo, le secteur semble être organisé avec la présence d’organisations (notamment la Fédération Togolaise de l’Immobilier (FTI) qui regroupe plusieurs associations) d’une part et les lois qui régissent le secteur d’une part; Mais il semble échapper au contrôle de l’Etat.
Population tétanisée par la caution bail
En effet, le gros souci de l’immobilier au Togo est l’épineuse question de caution, de la garantie de loyer et du bail d’habitation quand il s’agit de location de maison, chambre, boutique ou même de terrain. La caution constitue un souci parce qu’il est de plus en plus exorbitant et revient trop élevé pour le togolais lambda déjà affecté par le faible pouvoir d’achat.
« Au Togo, ne loue pas une chambre qui veut, mais qui peut. A part l’agriculture, la plupart des activités pour les mener, il faut aller en ville. C’est là qu’on est obligé de louer un local. Tu viens en ville pour te débrouiller, mais tu as la peine à t’en sortir parce que loyer prend une bonne partie de ce que tu gagnes durant le moi, d’ailleurs trouver la caution pour avoir le local est d’abord un grand souci. C’est un véritable problème auquel nous sommes confronter tristement », a déploré Olivier, détenteur de boutique de quincaillerie à Kpalimé.
« Dans la vie, on ne déplace pas un local, sinon certains ne seraient pas confronter au problème de location. Ils ont bel et bien et des maisons et autres mais pour des raisons diverses, ils sont obligés de louer ailleurs. Tu es étudiant, tu dois étudier en ville ou à Lomé par exemple, si tes parents n’ont pas le moyen de payer la caution exorbitante, sans oublier ton déplacement et manger qui viendront s’ajouter, c’est que tu ne pourras plus continuer tes études. La problématique de caution bail au Togo devient un fléau qui doit amener les acteurs à sérieusement y penser », s’est lamenté un enseignant retraité.
Une réglementation de l’Immobilier qui souffre d’effectivité
Le 05 janvier 2022, le gouvernement a adopté le décret portant réglementation de la caution, de la garantie de loyer et du bail d’habitation. Ceci dans le but de mettre un terme aux spéculations et aux surenchères qui excluent les moins nantis des logements décents.
Il est destiné à assainir ce domaine avec le plafonnement aussi bien de la caution que de la garantie à trois (03) mois. Le décret est censé permettre d’adopter des mesures équilibrées qui protègent à la fois le locataire et rassure les investisseurs (les bailleurs). Les objectifs s’inscrivent dans la poursuite des actions menées en faveur de l’inclusion sociale des populations, une vision sociale du Président du Conseil, Faure Essozimna Gnassingbé. Sauf que 3 ans après l’adoption de la loin son application n’est toujours pas effective. Cette question de caution désole bon nombre de Togolais. Les plus pauvres subissent sous le regard impuissant de l’Etat.
« L’Etat a beau vouloir réglementer ou plafonner cette caution bail, mais je vois mal la réussite de la réglementation de cette caution bail. Parce que le bien appartient à un tiers. Quelqu’un qui a souffert, malgré la cherté de la vie, la cherté des terrains, la cherté des matériaux de construction, arrive à construire une maison ; d’abord il est libre de la mettre en location ou non. Maintenant après tout cet effort, lui imposer une somme à percevoir pour la louer sera compliqué. Il dira qu’il ne force personne à venir louer selon son prix fixé. Alors que le locataire, lui, il a besoin quand même du local pour habiter et faire ses activités. Ce dernier va‑t‑il se fier au plafonnement de l’Etat ? Dans ce cas, il ira louer la chambre ou la maison construite par l’Etat, ce qui n’existe pas. En gros, c’est compliqué à règlementer », a regretté Monsieur Jeff, un enseignant retraité, propriétaire de maison à Lomé.
Immobilier, couloir de blanchiment d’argent
Au-delà de tous, la situation fait l’affaire des investisseurs ou bailleurs. Le secteur de l’immobilier est devenu porteur et beaucoup investissent dedans. Il est devenu le secteur par excellence de blanchiment d’argent selon le Groupe intergouvernemental d’action contre le blanchiment d’argent en Afrique de l’Ouest (GIABA).
Pour la GIABA, le secteur de l’immobilier présente une vulnérabilité croissante face aux activités de blanchiment d’argent. Les analyses du groupe révèlent que plusieurs failles contribuent à cette vulnérabilité notamment absence de cadre juridique adapté, manque de supervision, contrôle insuffisant et quasi-inexistence de sanctions à l’encontre des acteurs défaillants.
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« Beaucoup utilisent l’immobilier pour dissimuler l’origine illicite de leurs fonds. Ils achètent, construisent ou revendent des biens en toute discrétion, échappant ainsi aux mécanismes classiques de contrôle », a indiqué Akuitem Tchaa-Bignozi, président de la Cellule nationale de traitement des informations financières (CENTIF) lors d’un atelier tenu lundi 15 avril 2025 sur la vulnérabilité du secteur de l’immobilier face au blanchiment d’argent.
Alor que les textes réglementaires dorment dans les tiroirs, la réalité du terrain écrase les plus vulnérables sous le poids de cautions abusives avec des loyers exorbitants. Face à l’impuissance de l’Etat à contrôler la caution, n’est-il pas temps d’envisager logements sociaux pour soulager les plus vulnérable ?
La Rédaction